mardi 22 décembre 2009

Cadeau de Noël

Parfois, à force, on ne sait plus où donner de la tête. On ne sait plus où donner du cœur. On ne sait plus grand chose, en fait. Alors quand le maelström est trop intense, il est utile de pouvoir s'installer tout au cœur de soi, pour laisser le vide nous occuper un peu, le temps d'une brise subtile et silencieuse. Alors la barque intérieure s'ébranle et ose passer la barre.

Cette exploration, ce flottement de l'âme, est un moment de découverte toujours étonnant, même si les méandres intérieurs conservent au fil du temps les mêmes courbes, les mêmes remous, les mêmes courants de fond qui apportent la même houle et les mêmes nausées. Simplement, on ne vit plus l'expérience comme la dernière fois. À force, le voyage apaise.

Parfois, quand on sait l'écouter, notre voyage intime nous est même raconté par d'autres et c'est alors une véritable surprise d'entendre ce que nous n'avions jamais osé raconter, par pudeur, par timidité et par l'expérience tant de fois vécue de l'indifférence.

Dernièrement, un ami que je sais être aussi discret et timide que moi m'a en effet raconté des bribes de l'histoire de ses parents et j'ai vu, dans les interstices de son récit, apparaître les miens.

Nos parents se sont peut-être croisés, pendant la seconde guerre mondiale, alors que son père soldat ravitaillait le mess des officiers canadiens d'Anvers et que le père de ma mère s'enrichissait au marché noir. Sa mère à lui avait quitté les Pays-Bas pour la Belgique. Mon père à moi avait été arrêté par la milice rexiste et envoyé dans les camps de travail en Allemagne, pendant plus de deux ans. Les quatre ont survécu. Se sont-ils croisés sans se voir, à Bruxelles ou à Bruges ?

À la fin de la guerre, ils ont tous traversé l'Atlantique et l'histoire s'est poursuivie en Amérique, avec nous qui allions arriver. Mon ami et moi avons tous les deux été bercés par les récits de la guerre, par des vies aux rêves brisés puis reconstruits, par le déracinement, les dérives et le temporaire comme certitude, encombré de valises et d'avions, des "ici" et des "là-bas", des allers-retours au dessus de l'Atlantique jamais tout à fait franchi, ni dans un sens ni dans l'autre. De simples récits d'immigration...

Comme mon ami discret, j'ai le souvenir de ma mère qui faisait ses vraies courses chez le pâtissier alors que tout le monde allait chez Steinberg. Dans les années soixante, il était le seul à des kilomètres à la ronde à savoir faire la baguette, à offrir des pâtés de foie, des fromages français et suisses. Il savait faire les petits fours des grandes occasions, le kramiek du matin, bref, tout ce qui ne se trouvait pas encore dans les épiceries du Québec. Sans parler du café.

J'ai le souvenir d'avoir grandi un peu à côté. Décalée par rapport aux traditions d'ici, aux évidences de la famille et aux certitudes en général. J'ai le souvenir d'avoir été l'Autre, celle qui n'a aucun souvenir de dinde de Noël, d'atocas ou de set carré.

C'est cette Autre, assise au centre du maelström, qui redécouvre sa propre histoire, par l'ami qui lui a offert le cadeau de raconter le sienne, par un bel après-midi de décembre. Et par ces histoires qu'elle a enchevêtrées, le temps d'une brise subtile et silencieuse, elle se relie.

À force, le voyage apaise.

lundi 14 décembre 2009

Présence humaine

"Je ne peins pas l'être, je peins le passage".
Montaigne

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mercredi 9 décembre 2009

Le 3e Oeil - The 3rd Eye

Robert Fludd, 1619
Utriusque cosmi maioris scilicet et minoris...

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samedi 5 décembre 2009

Go on shopping, folks, everything is ok

Enjoy this post modern experience provided by users like you.

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jeudi 3 décembre 2009

Hermeneutics from the Heart


You surely know about it. But just in case...This is an example of how a descriptive text can become poetry...

How can we discover what was hidden in it while we thought we were in control...

How we can become creative again just by playing with words, by discovering how they can flow on a page...

How everything is there, before our eyes but we had not paid attention. So meaning emerges like when words pop up from a text and start juggling with one another. It is an hermeneutics process, but a poetic one, directly from the pulsing heart. I had written a short message to someone who asked for some information about the 3rd Eye practice. This is what came out, one of the dozens of possibilities. In my own text, when wordle showed me this configuration, I saw that images were leveraging everything else. Not a discovery per se but a confirmation, a mirror of my own understanding. A simple Wordle and the world expands, based on the calculation of word occurences in a text.

Get to Wordle here.

mercredi 2 décembre 2009

Hopenhagen

Hopenhagen: l'espoir d'un changement | Humanvillage

Les Nations Unies, l'Association Internationale de la Publicité (AIP) et une coalition formée des plus grandes agences de presse, de marketing et de publicité au monde, ont lancé Hopenhagen, un mouvement destiné à permettre aux citoyens du monde de s'engager dans le cadre de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques de décembre 2009 à Copenhague (COP15).

Hopenhagen est une opération de communication et de marketing mondiale qui tente d’inspirer et de susciter un élan massif à travers le monde en faveur du climat...

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lundi 30 novembre 2009

Les limites du contrôle

À force d'explorer les méandres de la complexité, de l'émergence et des processus créatifs, on finit parfois par trouver des perles. Une récente découverte est le très onirique film de Jim Jarmusch, The Limits of Control (2009).

On y suit les étapes du parcours toujours identique, et pourtant chaque fois très légèrement différent, d'un homme qui a une mission. Pour qu'elle réussisse, il doit rester alerte, suivre les instructions, ne pas déroger des règles, ne rien modifier, bref, tout doit rester sous contrôle. Malheureusement, des petites ruptures commencent à se produire, qui l'obligent à s'adapter. Il rencontre plusieurs personnages, certains vont l'aider à poursuivre son but, d'autres vont lui mettre des bâtons dans les roues. Chaque fois, il devra s'adapter. Et chaque fois, la réalité semblera un peu moins solide, un peu moins plausible, de moins en moins assurée.

Et, lentement, cet homme en mission glisse, et nous glissons avec lui, dans l'imaginaire, jusqu'à découvrir que cette réalité n'était que le reflet de ce que nous avions cru être la réalité. Miroirs et reflets, encore et toujours, récursifs à l'infini.

En abandonnant cette volonté farouche de contrôle, nous glissons subrepticement dans un univers parallèle qui ne se dévoile que lentement, un geste à la fois, entre routines et rupture du processus, vers la création, vers l'art.

C'est un road movie qui nous emmène en errance, sur la route qui mène de la réalité à l'imaginaire, du contrôle de la pensée à la libération par l'art. Entre Paris, Madrid, Séville et un petit village andalou juché sur les hauteurs, du genre d'Arcos de la Frontera, un homme mène sa quête et réussit sa mission grâce à son imagination patiente et un état de présence solidement ancré.

Onirique, le miroir que nous n'avions pas vu se dévoile tout à coup pour nous montrer que le reflet, que nous avions cru être la réalité, était lui-même un imaginaire...

Parfois le reflet est beaucoup plus réel que ce qu'il reflète.

samedi 28 novembre 2009

Living together

When several units communicate with each other and change their behavior according to what is happening around. Which dot is representing you?

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lundi 23 novembre 2009

samedi 21 novembre 2009

L'eau qui danse, la pomme qui chante et l'oiseau qui dit la vérité

"La vérité de cette histoire est qu'à chaque vie humaine
Apparaît toujours une occasion d'induire la lumière."

Composition Gilles Tremblay, livret Pierre Morency
Chants Libres, compagnie lyrique de création

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vendredi 20 novembre 2009

Just Do it

When you obey all the rules, you miss all the fun.
Katharine Hepburn

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Collective Intelligence

300,000 Birds Swarm Over Denmark

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jeudi 19 novembre 2009

Je t'ai à l'oeil

Do you feel it?

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Il y a des jours, comme ça

Passer des heures avec les bronches qui brûlent.
Se frotter les yeux qui piquent et qui pleurent, tout ça parce que le smog est devenu un phénomène quasi banal dans nos contrées nonchalantes.

Apprendre que les voisins du dessus ont tous le H1N1 et les entendre cavaler, l'air plutôt gaillard, alors qu'on a passé soi-même deux jours à l'horizontale, l'estomac convulsé et la tête en vrille au moindre mouvement, tout ça par effet secondaire... du vaccin !

Lire dans les journaux les effets négatifs de l'immobilisme de nos institutions de recherche et d'enseignement sur les étudiants, dont les crédits ne sont pas reconnus d'une université à l'autre, alors que l'UQAM et la Téluq soit-disant fusionnent -fastidieusement- depuis deux ans.

Constater chaque jour, avec stupéfaction, le décalage énorme entre l'institution et le monde qui pulse et qui vibre, tout autour, se transformant sans l'attendre. Décalage de rythme, de rapport au savoir, de finalité de la recherche, de croyances et de culture...

Quels gestes poser pour passer au XXIe siècle, dites-moi ?

Et retrouver cette petite phrase qu'on adore citer : à part l'université, il n'y a qu'une seule autre institution aussi lente et aussi réfractaire au changement : le Vatican.

Finalement, se dire que tout ça n'est pas encore mûr. D'autres diront que ça ne fait pas encore assez mal. D'autres encore seraient plus inquiets et se demanderaient s'il restera du temps ou si nous aurons failli, les bras ballants, sans avoir osé.

Pour reprendre encore une belle citation, d'Albert Camus, sur la nécessité de cohérence : Nous vivons avec des idées qui, si nous les éprouvions vraiment, devraient bouleverser toute notre vie.

Been there, done that...

De la boutique officielle de Rue89

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mercredi 18 novembre 2009

mercredi 11 novembre 2009

Faire tomber les murs

Il y a parfois des moments dans la vie où l'énergie se retrouve catalysée, attirée, aimantée. Ce sont des instants, des parenthèses qui densifient l'expérience en la faisant tourbillonner dans les profondeurs, avant de se déposer doucement dans la mémoire.

Il y a quelques semaines, j'ai eu la chance de vivre une telle expérience, hors du temps, qui a eu cet effet de condensation, comme si j'avais eu droit à un boost de vie, d'âme, de joie et de paix. Ce fut un moment d'une grand qualité, toute une journée à penser ensemble, à être ensemble, simplement, hors des murs étroits de nos prisons mentales.

Nous avions lancé l'appel. Un appel à incarner une idée simple, puissante, mais encore largement inusitée, dans nos sociétés calcifiées. Il s'agissait de se rassembler et de réfléchir en petits groupes à des sujets que nous choisissions et que nous traitions sans entrave, pour ensuite les partager tous ensemble.

On pourrait avoir tout dit en expliquant la chose comme cela. Ce faisant, par contre, nous aurions omis l'essentiel : aborder la qualité de ce qui se produit quand l'intelligence devient effectivement collective. Il arrive en effet très vite un moment où le bien-être s'installe. Où les défenses implicites se dissolvent, par inutilité. Il y a aussi des moments où l'on se dit que ça n'est pas possible. Que ça ne peut pas tenir qu'à ça. Qu'il doit bien y avoir une arnaque quelque part, qu'il est impossible que cette bulle foisonnante se crée uniquement grâce à ça.

Et pourtant. C'est bien de ça qu'il s'agit. De l'apparente insoutenable légèreté de la force du collectif, quand il décide, ou plutôt quand nous décidons de faire porter nos énergies personnelles vers le bien commun, vers un projet partagé, sans l'encombrer des entraves habituelles de nos petites voix intérieures, celle de la peur, du cynisme, de la honte, du mépris, etc. qui sont autant de tentatives d'obstruction mentale pour résister à l'ouverture.

L'incrédulité et la peur sont en effet des maîtres très exigeants, surtout quand l'expérience partagée déstabilise, faisant fondre à vue d'œil la glace de nos certitudes. Certains tenteront de se raccrocher à des arguments du genre ça ne se fera jamais dans les entreprises. D'autres cherchent à vérifier l'efficacité du processus en demandant ce que ça donne. D'autres encore diront du haut de leur belvédère que ça ne peut pas marcher, car ça bousculerait toutes les façons de faire.

Ce sont des préoccupations bien légitimes et il faut les écouter car l'intégration de pratiques différentes a effectivement des impacts importants au sein des organisations. Par contre, ce ne sont pas les seuls paramètres à questionner. Il faut souvent refaire l'exercice qui consiste à rappeler que c'est parce que nous croyons que nous sommes isolés que nous le sommes. Que c'est parce que nous occultons nous-mêmes l'humain dans nos organisations que nous acceptons sans broncher des normes et des règles qui en confirment la non-existence.

Cette dissociation entre nos aspirations humanistes et les normes desséchantes auxquelles nous nous soumettons a de lourds impacts. Elle nous rend malheureux, isolés et en perpétuel manque de relations authentiques. La perte de sens qui en résulte fait de nous des êtres qui renoncent, qui se taisent et qui démissionnent, devant la lourdeur de la tâche à accomplir pour renverser la vapeur de la déshumanisation, qui profite de manière magistrale aux metteurs en scène du grand spectacle néo-libéral.

Et si la qualité de l'expérience vécue ensemble était une fin en soi ? Retrouver la joie d'être ensemble, simplement. S'inviter les uns les autres et partager, mettre en commun, vivre un bon moment à redécouvrir l'autre, dans tout son être.

Et si l'intelligence collective était cette socialité du fond des âges que nous retrouvions, une conversation à la fois ?

En fait, ce beau moment d'intelligence collective que nous avons vécu à la fin octobre avait ces qualités. Être ensemble, raconter, se raconter, apprendre, prendre le temps, rire, être surpris, partager et découvrir, sans autre intention que celle de vivre collectivement un moment heureux, foisonnant et inspirant, avec des gens qui apportaient avec eux ce même état d'esprit.

Que l'on réagisse à l'existence de telles pratiques en affirmant que c'est impossible montre la gravité de l'endoctrinement qui nous a poussé peu à peu à oublier l'essentiel de ce qui fait de nous des humains. Que l'on en cherche à tous prix l'efficacité révèle à quel point tout ce que nous faisons est jugé -par nous et par les autres- sur la base d'une définition de l'utilité uniquement centrée sur la recherche de l'augmentation de la productivité, à travers chacun de nos gestes. Que l'on s'en moque, activant là le levier du cynisme, montre la profondeur de l'angoisse qui nous habite, car si une telle chose était effectivement possible, c'est toute une logique de vie qui basculerait d'un coup...

La rationalité instrumentale des organisations se fissurerait, bousculant ainsi l'ordre établi qui réduit, tant que faire se peut, par ses diktats managériaux, l'existence d'espaces de parole libres au sein des entreprises et des organismes publics. C'est la culture du vivre ensemble qui s'en trouverait modifiée, soudain mue et propulsée par ce qui fait vibrer, ce qui donne du sens, ce qui anime vraiment.

Évidemment, la chose en question - l'intelligence collective- étant effectivement possible, il est naturel que de larges pans de murs de certitudes personnelles soient en train de tomber, une expérience à la fois, pour les participants. Dès lors, ils commencent à repérer les brèches et les interstices dans lesquels ils peuvent s'engouffrer pour insuffler un supplément d'âme aux collectifs auxquels ils contribuent.

Ce que nous avons vécu, à la fin octobre 2009, a fait tomber des pans de mur, comme les pans berlinois, retombés cette semaine, pour montrer que les murs sont tenaces, rigides et lourds à vivre mais que l'énergie du collectif les soulèvent, les fragmente, les fait basculer, dès que l'espoir renaît.

Il faut donc parfois croire pour réussir à voir, plutôt que de voir pour tenter de croire. Autrement dit, c'est l'expérience qui transforme, pas le discours. Be the change you want to see in the world, disait Gandhi, n'attendez pas que le changement vous convainque, il ne le fera pas. Et même si vous en entendez parler, vous n'y croirez pas. Incarnez-le plutôt, c'est l'art de l'apprentissage dans l'action. De nos aspirations à nos actes, c'est une invitation à la cohérence.

lundi 19 octobre 2009

Sur la route de l'intelligence collective


Intelligence collective en marche


Comment incarner la démocratie dans le monde actuel?

Et si c'était par un leadership participatif et un apprentissage collectif

que l'utilité de notre participation à la vie démocratique

prendrait toute son importance?


Faisons émerger notre futur, une conversation à la fois.


Rendez-vous le 29 octobre 2009, à Montréal, de midi à 21h00.

Université du Québec à Montréal, salle DR-200.


Le site de la communauté a émergé, venez nous -y rejoindre.
Pour vous y inscrire :

http://emergencefutur.ning.com/

samedi 26 septembre 2009

Le futur émerge

Ça semble évident. Le futur émerge dès qu'on y pense et même pendant qu'on s'active à autre chose. Ce qui fait la différence, c'est sans doute l'attention qu'on y porte et l'énergie qu'on y met. Certains parlent du choix que l'on a de laisser passer la parade ou d'y devenir majorette. D'autres de sauter dans le train en marche. Il y a même ces histoires de tunnel, de lumière au bout, qui serait plutôt l'autre train, celui qui arrive en face... Bref, les métaphores ne manquent pas pour aborder la question du futur auquel on ne sait jamais vraiment si on y est pour quelque chose.

Pour y voir plus clair, mais surtout parce que notre responsabilité est d'en faire quelque chose qui soit à la hauteur de nos aspirations, l'idée d'un atelier dédié à ce futur a germé, doucement, au printemps 2008. En août 2008, nous nous étions retrouvés quelques uns à Val-David, pour faire un atelier de 24 heures lors duquel nous avons appris les uns des autres. Nous avons ainsi pu parler d'émergence en tentant d'agir de manière cohérente avec des principes déjà partagés par tous, au moins sous forme d'aspirations. Nous pensions que nous sommes responsables du changement qui s'opère. Nous sommes le système. Nous avions intégré l'appel de Gandhi : "Be the change you want ot see in the world". Du coup, pour être conséquent, il faut chercher à vivre de manière cohérente. Assumer. "Walk the Talk" ne dit-on pas ? Le tout en n'oubliant pas de rester critique face à une mouvance démocratique toujours fragile, souvent glissante, simple à instrumentaliser et à subordonner à des fins qui sont tout autres... Pratiques positives par essence, par affiliation lointaine aux fondement de la psychologie positive, elles véhiculent et incarnent une vision du monde que l'on nomme aujourd'hui responsable, inscrite dans le paradigme de la durabilité, encore considéré comme fastidieux, difficile à traduire dans l'action. Fin 2009, sommes encore confrontés au déni et le sommet de Copenhague nous dira si ça bouge un peu.

En attendant, il nous faut agir de manière conséquente. Comment faire ? Quelle est cette posture intérieure d'intégrité ? De quoi est faite cette relation au monde qui se veut authentique ? Comment créer des espaces permettant de vivre concrètement d'après ces principes ? J'avais déjà participé à une dizaine de jours de formation à plusieurs approches utiles, à partir de 2003. J'y avais rencontré des personnes clés dans cette mouvance de participation démocratique, de transformation sociale, de mobilisation douce, ancrée dans un terreau philosophique bien irrigué. Du bouddhisme à l'existentialisme en passant par les réflexions de penseurs devenus des repères : Krishnamurti, Martin Buber, Kitaro Nishida, Gregory Bateson, Francisco Varela, Chris Argyris, Noam Chomsky, Peter Senge, Omar Aktouf, Otto Scharmer, Ken Wilber, Margaret Wheatley, Edgar Morin, Jean-Louis LeMoigne, Juanita Brown, tout comme Schiller, Pierre Guillet de Monthoux, Antonio Strati et plusieurs autres qui disaient si bien le rapport esthétique au monde... Autant de lumières dans la pénombre du quotidien.

J'ai aussi pu pratiqué plusieurs arts, entre autres : le forum ouvert de Harrison Owen, le dialogue authentique de Thierry Pauchant, qui fut mon directeur de thèse et qui travaille sur l'éthique, le world café, de Juanita Brown et Bill Isaacs, ainsi que ce qui est devenu fondateur comme modèle d'action, l'art des semailles et des moissons, autrement dit the Art of Hosting, où l'on retrouve des praticiens allumés, au cœur ouvert et créatifs, comme Toke paludan Moeller que j'ai rencontré de nouveau à Copenhague en juin dernier.

Et puis, pour explorer l'autre versant, plus conceptuel, qui met en lumière les finalités de cette perspective tout en la considérant par ses concepts et sa dynamique, je suis entrée en dialogue avec George Por, avec qui j'aurai la chance de travailler en octobre. George porte son attention sur l'intelligence collective, qui permet de qualifier et d'englober tout ce qui précède. En donnant une image, un sens, une véritable épistémologie humaniste de la complexité, axée sur l'action, à toutes ces pratiques disparates en résonance l'une avec l'autre, l'intelligence collective devient une sorte de clé de voute de cette architecture humaine et sociale.

Du coup, l'intervention que nous faisons en animant créativement (hosting) et en recueillant la mémoire de l'activité collective (harvesting) est une activité de transformation qui participe au design social. Conclusion : nous participons ainsi à faire émerger le futur. CQFD.

C'est la raison pour laquelle, nous du 4e Œil, croyons qu'il est utile de passer à l'action dans cet esprit, afin de sensibiliser la communauté à ces façons de faire qui donnent du souffle et incarnent précisément nos aspirations. Elles inspirent.

Nous vous convions donc à notre seconde rencontre, les 28 et 29 octobre prochains, à l'UQAM où nous allons tenir une session et un atelier de travail en mettant en œuvre ces pratiques au service de plusieurs enjeux critiques sur lesquels nous allons nous pencher. Vous êtes invités.

La session de travail vous fera traverser le grand U de la transformation humaine et l'atelier de travail se penchera sur l'urgence d'agir, de dialoguer, de réfléchir ensemble aux problèmes qui nous préoccupent le plus dans la société, comme le déficit démocratique, les enjeux environnementaux, le manque de vision pour le développement municipal, les refontes en santé, en éducation, et surtout les moyens d'agir sur le terrain que nous pouvons nous donner, dès aujourd'hui... Les deux activités sont complémentaires et réuniront des praticiens, des étudiants, des chercheurs, des intéressés, passifs et actifs, dans la communauté.

Au plaisir de vous rencontrer les 28 et 29 octobre prochains.

Pour plus d'information, n'hésitez pas à me contacter.

dimanche 30 août 2009

L'étrange légèreté des bulles de mémoire

En ce début de XXIe siècle, rien n'est plus très loin de chez soi, du moins dans l'imaginaire mondialisé qui est le nôtre. Il est devenu tout à fait naturel, -pour ceux qui peuvent se le payer, reconnaissons-le-, de considérer la planète entière comme son arrière-cours, comme la proche banlieue. Pour beaucoup, le discours de revendication identitaire des années soixante n'est tout simplement plus pertinent, à une époque où il est devenu naturel de faire preuve de porosité culturelle, de parler plusieurs langues plutôt qu'une, d'échanger au quotidien avec des amis d'un peu partout dans le monde et de créer ensemble à partir de référents disparates, culturellement riches et de plus en plus métissés à force de se tisser les uns aux autres.

Parfois alourdies par de multiples avatars, nos identités physiques et virtuelles se décuplent également, nous offrant ainsi la chance de vivre parfois des expériences fascinantes. À bien y penser, alors que les frontières imaginaires des baby boomers se sont dissoutes dans la mondialisation culturelle des X et des Y, nos voyages et nos découvertes aussi ont changé. Non seulement le temps et l'espace fondent-ils jusqu'à disparaître mais il arrive aussi que le présent se dissolve dans le passé. Ou l'inverse.

Plutôt cette année, j'ai eu la chance de retourner quelques temps en Scandinavie, où j'avais vécu il y a bien des années. Tout juste débarquée à Copenhague, quelle ne fut pas ma surprise de m'entendre recommencer à parler danois, alors que cette compétence était devenue depuis longtemps une simple curiosité de salon, n'ayant jamais l'occasion de la pratiquer. Autour de moi, le danois c'est du chinois et, si la tendance se maintient, mes enfants parleront mandarin bien avant de penser à apprendre à parler danois.

Quelle découverte je fis en m'entendant faire des exploits d'expression sans savoir que j'en avais la capacité. Je savais bien que j'avais appris la langue, que je l'avais pratiquée pendant plus de deux ans mais je n'avais aucune idée que, comme le vélo, ça ne s'oublie pas. J'étais persuadée de pouvoir, au plus, reconnaitre le vélo, jamais je n'aurais cru que je saurais remonter sur l'engin et le faire avancer... Sans volontarisme aucun, les mots, les expressions, les tournures de phrases et les modulations et les tics de langage revenaient pourtant un à un, au besoin, parce que la situation s'y prêtait.

J'en était soufflée. Comment diable mon cerveau avait-il pu m'en cacher autant ? Ces bulles de mémoire me surprenaient chaque jour un peu plus, au point où j'ai même fini par acheter l'œuvre poétique complète de Tove Ditlevsen pour pouvoir la lire dans le texte.

Je n'en revenais pas moi-même. Quelle expérience extraordinaire que le mystère de la réminiscence. D'où venait cette posture, toute entière tournée vers le présent, qui puisait simultanément à un passé datant de plus de 30 ans ?! Remontant à la surface une à une, ces bulles de vocabulaire, de culture, de sensations, pétillaient dans la tête et dans le cœur avec bonheur.

On ne sait pas que l'on sait, faudrait-il en conclure. Pour être plus précis, il faudrait aussi ajouter que l'on commence seulement à s'en apercevoir quand le contexte tout à coup s'y prête, que la situation l'impose, et qu'il devient pertinent de mobiliser ces connaissances si bien enfouies qu'elles se sont presqu'entièrement desséchées, au fil du temps. Du moins le croit-on... En fait, elles sont tapies et n'attendent que le bon moment pour ressurgir.

Ça donne envie de se scruter à la loupe, de poser un miroir devant soi et de regarder intensément. Autrement dit, une telle expérience déclenche la curiosité qu'il faut pour faire de la recherche à la 1e personne sur l'univers sensible de la mémoire, entre passé et présent, entre ici et là-bas, entre l'autre que je suis et moi-même.

C'est un beau programme de recherche, ne trouvez-vous pas ?

mercredi 26 août 2009

Le baume de la vacuité


Il y avait environ 24 mois que le cerveau turbinait sans relâche. Alors, sans surprise, avec toute l'inertie qu'on connaît aux gros paquebots, quand il s'est agit de stopper les machines, une fois les pieds dans la sable, ce ne fut pas de tout repos. Quel est ce délire, me direz-vous ? Quand on prend des vacances, on s'en réjouit, point. Pas la peine d'en rajouter. Les autres aussi ont droit à un peu de silence, après tout.

Vous n'y êtes pas du tout. En fait, j'ai vécu une expérience fascinante : celle du cerveau qui a oublié la manœuvre de freinage, qui ne retrouve plus la mise au neutre. Un cerveau qui est tellement encombré par le rythme infernal de la pensée -n'importe laquelle, d'ailleurs, ici pas de discrimination ni de contrôle qualité- qu'il roule en continu, générant ses propres tics. Ce cerveau-là devient un cerveau lent, qui s'ignore. Une part de vivant qui met à risque tout le reste, cet autre qui ne cherche que l'immobilité, le silence et le vide du repos.

Fascinante expérience car j'ai pu l'observer tenter de se mettre à off sur mes ordres. Les circonstances étaient favorables : il s'agissait de lâcher prise et non de performer. Aussi cool qu'il puisse paraître, le projet fut pourtant bien fastidieux à réaliser. Ça lui aura bien pris trois semaines, à ce cerveau en cavale, pour se calmer un peu. Trois semaines d'entraînement au vide. Au rien. Au fait de se guérir en stoppant toute activité intentionnelle autre que la base du minimum : manger, dormir et se reposer.

Quelle découverte et quel constat décapant : il aura fallu s'entraîner pendant trois semaines pour arriver à rester simplement assis dans le sable à regarder le ciel sans intention, sans agacement et sans nervosité soudaine. Mon cheval sauvage intérieur repartait au grand galop chaque fois que j'avais oublié de ne penser à rien. Chaque fois que je glissais de nouveau dans le machinal, l'automatisme, la non conscience et la non présence. Quel labeur que de retrouver un état à peu près contemplatif !

Quand ce vide très riche a finalement réussi à occuper l'espace très appauvri de ce cerveau encombré par deux ans de pression, une sorte de plénitude très douce et sereine a fini par poindre, pendant des instants de plus en plus longs. Souvent, il ne se passait rien. Et puis parfois, mon esprit s'arrêtait un instant sur un bleu profond, très haut au dessus de la dune, ou encore j'entendais avec ravissement le son soyeux du sable sous les pieds. Quelle paix. Quand on arrive là, il reste peu de mots pour expliquer les choses. D'ailleurs, c'est l'envie elle-même d'expliquer qui n'existe presque plus.

Cet exercice salutaire mené quotidiennement a simplement permis de faire de l'espace, de faire un ménage intérieur pour redonner à la pensée la possibilité de se déployer de nouveau. Il a été curatif, tel un baume sur une plaie à vif.

J'ai pensé souvent, pendant cette parenthèse quasi médicinale, aux sournoises infiltrations du stress et à ce qu'elles provoquent chez les humains qui ne réussissent plus à s'arrêter. Quand ils ne savent plus stopper la machine, c'est l'impasse. Une impasse mortelle, parfois. Qu'importe alors la prochaine promotion, l'augmentation de salaire, les résultats et les défis de performance. Le fait qu'ils puissent devenir omniprésents, qu'ils passent aux commandes de nos vies, devenant des déclencheurs de mort, devrait nous ramener à l'essentiel.

Pour le retrouver, il faut donc parfois s'arrêter. Faire en sorte que la pensée laisse place à ce vide si riche, cette vacuité, creuset de nos inspirations, source d'idées et d'émotions, source de plaisir et de vie.

Bien que trente rayons convergent au moyeu
C'est son vide médian qui fait avancer le char.
Les vases sont faits d'argile,
mais c'est du vide interne que dépend leur usage.
Une maison est percée de portes et de fenêtres,
mais c'est le vide encore qui permet l'habitat.
Ainsi, l'être a des aptitudes que le non-être emploie.

Lao Tseu



mercredi 24 juin 2009

Si on s'y mettait...


Je ne sais pas si vous êtes comme moi mais il m'arrive souvent de me passer des commentaires appréciatifs -que j'ai la plupart du temps la bonne idée de garder pour moi- concernant ce que j'aurais fait autrement, si j'avais été à leur place. À la place de ceux qui étaient en charge.

Vous ne pouvez pas vous imaginer à quel point c'est agaçant d'être aux prises avec ces commentaires critiques qui surgissent dans votre tête à tout moment, dans toutes sortes de situations de communication. Mais je spécule sans savoir. Peut-être avez-vous aussi développé au fil du temps ce regard critique sur notre société, ce désir inabouti de voir des petits détails du quotidien prendre une autre forme, changer de cadre, se présenter autrement. En fait, même si le mot changement est devenu une véritable tarte la crème (drôle d'expression, tout de même) qu'on a presque honte de convoquer dans le discours ces temps-ci, il faut tout de même reconnaître qu'il y a pas mal de petites choses que j'aurais changées, si j'avais été en charge au moment où c'était possible.

J'aurais raccourci un spectacle, permuté l'ordre de présentation de deux conférenciers, offert plus de temps à l'un, suggéré à l'autre de montrer ses fameuses images plutôt que d'en parler. J'aurais vérifié la cohérence entre les images et le commentaire du journaliste dans son reportage raté du téléjournal, j'aurais assis un journaliste en studio pour faire l'analyse d'une situation plutôt que de nous défiler une ribambelle de faits sans les expliquer...

Dans d'autres cas, c'est tout aussi agaçant et encore plus fondamental. En contexte de conseil et d'intervention, j'aurais évoqué avec le client l'importance de faire participer ses employés aux prises de décision et j'aurais pris le temps de lui expliquer que l'adhésion et la confiance bourgeonnent peu à peu, comme reflet approximatif de sa propre ouverture et de sa propre confiance.

À l'université, dans un cours ou dans un séminaire, j'aurais interpellé le groupe plutôt que de lui imposer un long exposé, je lui aurais donné la possibilité de déterminer les questions et les enjeux plutôt que lui assener un discours d'expert déconnecté de la réalité des jeunes de vingt ans.

Dans l'univers de la diffusion de la recherche académique, je me serais opposée à la dictature des 15 minutes de présentations imposées dans la plupart des colloques des grandes conférences scientifiques internationales.

Bref, j'aurais fait beaucoup de choses si j'avais pu, au moment où ça se décidait, mais je ne faisais pas partie de ceux qui concevaient ces événements, ces initiatives et ces activités. Je n'y avais pas été invitée.

Toutes ces initiatives dont je me plains, en ayant tout de même l'impression de ne pas être la seule, sont le fruit d'un travail noble, complexe et la plupart du temps invisible : le design. Ce travail créatif, qui consiste à passer du chaos des possibles à un ordre souple qui guide l'action, s'incarne de diverses manières d'un domaine à l'autre. On le connaît bien dans le monde de l'art, à travers le design de mode, le graphisme, le design environnemental, le design événementiel, la conception automobile, etc.

On le saisit déjà moins quand il est question de design pédagogique, véritable colonne vertébrale de toute situation d'apprentissage. Souvent déprécié, on l'assimile à du travail de "préparation de cours" et, ce faisant, il disparaît derrière les compétences de contenu -celles qui comptent vraiment- des professeurs et des formateurs.

Encore plus fugace, vu de l'extérieur, est ce qui ne se nomme même plus design : le travail du conseiller ou du consultant, qui se balade avec sa boite à outils virtuelle et son expérience. En quoi croyez-vous que consiste son travail ? À saisir les enjeux d'une situation, à fouiller dans sa boite à outils et dans son propre parcours pour concevoir une approche, une démarche, un processus ou une méthode pour aborder la situation et pour l'accompagner. Sur la base de ce design, il intervient, réalise un mandat, participe à faire émerger des solutions et contribue parfois à changer des choses mal aimées des gestionnaires car intangibles et fugaces : les comportements des personnes, le climat organisationnel, l'adhésion, la capacité d'innovation, la culture... Ça peut sembler étrange, si on n'y a jamais réfléchi sous cet angle, mais de telles interventions résultent toutes d'un design.

De nos jours, il est devenu naturel de participer. Nous voulons tous êtes partie prenante aux décisions -sans toujours accepter d'en assumer la responsabilité, reconnaisson-le-. Nous exigeons plus d'autonomie, une plus grande collaboration, de la flexibilité. On veut que ça bouge et que ça change. Yes, we can, nous a-t-on dit, récemment et, d'un coup, l'espoir a rejailli pendant quelques temps.

Nous avons d'ailleurs toute la technologie requise pour concrétiser le tout. Les boites à outils sont pleines, de la plus concrète à la plus immatérielle, elles accompagnent l'ingénieur, le consultant en gestion, l'intervenant social, le communicateur, chacun avec ce qui lui est essentiel dans l'action. Les réseaux sociaux et les lieux de co-création à distance, de Facebook à Twitter en passant par les wikis, sont autant d'exemples de l'art de la conversation à distance, de l'opportunité que nous nous donnons de penser ensemble. De l'instrumentation hard à la technologie sociale soft.

Certes, la technologie existe, mais nos façons de faire, elles, n'ont pas nécessairement beaucoup évolué. L'expression Don't pave the cowpath est un conseil que nous devrions tenter de ne pas oublier. Est-ce que le design de ce que nous imaginons est devenu plus collaboratif ? Mobilisons-nous l'intelligence collective dont nous disposons ? Réponse mitigée. Il est possible de concevoir ensemble mais nous préférons tout de même continuer à penser chacun pour soi. Pourquoi ? Par crainte de perdre le contrôle sur nos idées, par peur d'être remis en question par d'autres, par intérêt personnel, par protectionnisme et par corporatisme, avouons-le.

Évidemment, de tels choix ont des avantages. Il est moins compliqué de décider tout seul que de le faire collectivement, tous les dictateurs de ce monde vous le diront. Il est plus profitable pour un auteur d'exercer son plein droit de propriété et d'en récolter les maigres deniers que de penser et d'agir en mode Open Source. Néanmoins, il existe également des effets moins heureux.

Un employé m'a un jour raconté qu'il trouvait assez désagréable d'apprendre par les journaux les décisions prises par ses patrons. De tels gestes le démotivait, il ne se sentait pas du tout considéré, pas suffisamment utile -ni reconnu- pour qu'on ait même pensé à le consulter. Des exemples de la sorte, il en existe des milliers dans les organisations. Question de choix de gestion, basés sur des croyances profondes dont les sources sont enseignées dans les Écoles de commerce aux futurs MBAs de ce monde : les dirigeants décident, les employés exécutent...

Évidemment, quand on travaille à partir de telles croyances, on n'aura pas tendance à favoriser la participation. PODC (planifier, organiser, diriger, contrôler) qu'ils disent encore pour définir ce qu'est la gestion. C'est à croire que tous ces gestionnaires avaient séché le cours, le jour où on leur enseignait l'organisation apprenante, en trois heures, avant de revenir à des question plus importantes, comme la productivité. Si on leur avait dit que l'augmentation de la productivité est en partie basée sur la capacité des personnes à innover, ce qui repose entre autres sur la créativité, l'échange d'idées et la mise au défi des évidences, ils auraient peut-être saisi qu'il est plus efficace de penser à plusieurs plutôt que tout seul.

Dans les années 70, Jean-Pierre Ferland avait composé une chanson douce intitulée : "Si on s'y mettait...". Elle va bien avec aujourd'hui.

Au fait, un atelier de réflexion qui porte sur tout ceci est en cours de design. Il se tiendra à la fin octobre 2009 à Montréal. Si vous souhaitez y participer, vous êtes les bienvenus, il suffit de vous rendre ici : Presencing.

Bonne Saint-Jean.

vendredi 19 juin 2009

Métissage interdisciplinaire ou pourquoi suis-je à l'étroit quand je viens chez vous ?


Respirer à l'intérieur des murs d'une discipline est pour moi synonyme d'étouffement. D'où mon aisance à habiter en communication. C'est vaste, c'est venteux, il y a de l'espace, il y a même -et tant mieux- le risque de se perdre... C'est aussi là, dans ces espaces où l'on part en errance, que l'on fait de belles rencontres. J'en avais déjà abondamment traité en 2005, dans une ethnographie des pratiques du Cirque du Soleil et dans Les coulisses de l'innovation qui a été publié par la suite.

Après avoir fait la rencontre de Guillet de Monthoux et d'Antonio Strati à l'époque, une des belles découvertes que j'ai faites ces derniers jours est l'activité du groupe de recherche et d'intervention italien Trivioquadrivio. En rapprochant très concrètement l'art et les affaires, pas uniquement par le mécénat mais surtout par la fusion, le croisement des compétences et des regards et par le recours à ce qui est créatif dans ce qui est organisationnel, il y a création d'un métissage disciplinaire foisonnant.

À ce sujet, justement, où en sommes-nous de ce côté-ci de l'Atlantique, en francophonie ? Je cherche, je cherche, mais, pour le coup, je ne trouve pas... Quelles formes les façons de faire créatives, parfois artistiques, associées à la transformation des organisations prennent-elles de ce côté-ci de la grande mare ?

Théâtre en miroir (un groupe d'acteurs vient jouer les conflits d'une organisation, les employés regardent la performance et en discutent) ; apprendre à parler cheval pour faire du team building ; trouver son personnage à partir de l'univers de Tintin et faire un jeu de rôle pour découvrir son profil de gestionnaire ou d'employé... C'est créatif peut-être, mais ça l'est toujours à partir de l'univers de quelqu'un d'autre et ça nous est imposé.

Pourquoi ne pas franchir cette barrière normative de l'expression ? Qu'est-ce qui fait si peur ? Pourquoi les dirigeants font-ils tout ce qu'ils peuvent pour conserver très vivant ce tabou de l'expression ? On le sait, en fait. Plusieurs étudiants de maîtrise en communication de l'Uqam pourraient vous le dire. Tout le monde le sait.

En fait, ce serait comme appuyer sur le bouton Reset. Tout à coup, on traverse le miroir et on peut exprimer ce que l'on ressent. Vraiment. Imaginez les dégâts -pour les uns- et les libérations -pour les autres-. Ensuite, il faudrait tout revoir. Quelle énergie !

Nous aurions subitement changé de spectacle, de représentation. Les acteurs, la mise en scène, les décors, les dialogues, tout serait absolument différent. Subversif ? Et alors ! Ne faut-il pas d'abord savoir bien jouer sa propre pièce avant de tenter de jouer celle des autres avec inspiration ? Honnêtement.

Quand on prend le temps d'écouter ce qui se dit dans les moments creux, quand la garde du posturing est baissée, quand on se croit en sécurité, à l'abris des dirigeants, gardiens des tabous, tout à coup la parole redevient libre. Libre et en quête de sens, avide d'un peu plus d'authenticité, de joie et de paix. Juste un peu plus. Ce serait déjà bien.

Omar Aktouf avait déjà écrit en 1996 qu'il était temps d'appuyer sur Reset et de passer à l'humanisme extrême. De refonder le tout. Colossal, comme projet de société. L'avons-nous commencé ?

Non. Et c'est peut-être pour ça qu'on étouffe un peu.

Photo du 3e Œil, extraite d'une intervention faite au printemps 2009 auprès d'un groupe de cadres. Sur la feuille, la question posée était : "Professionnellement, qu'est-ce qui vous éteint ?"

Bienvenue !

D'abord, une petite charade d'accueil : mon premier détecte, cerne et repère, mon second ajoute la profondeur, mon troisième ressent et dévoile et mon quatrième analyse... Qui sommes-nous ?

Nous sommes de multiples regards posés sur le monde... Plus concrètement, vous entrez dans le carnet du 4e Œil, le journal de bord de mes recherches.

Maintenant, vous êtes sur le seuil. Les lieux sont vides et attendent patiemment d'être habités. J'entre et je m'installe. Évidemment, je vous invite à faire de même. Entrez, entrez. Vous voyez une sorte de chantier qui démarre. Grand escabeau, bâche par terre, pots de peinture, des outils, et du blanc. Les murs sont blancs. En fait, imaginez la recherche comme ce chantier. En travaux. En perpétuels travaux, d'un projet à l'autre.

C'est le début des travaux de l'été 2009 de la recherche que je mène depuis plus de 4 ans. Elle s'est un jour nommée naturellement, presque toute seule,
"Le 4e Œil", sans que j'aie vraiment à intervenir. Enfin pas de manière volontariste. Englobant le 3e Œil, le 4e Œil constitue un univers -une épistémologie- qui a pris forme, et qui se déploie peu à peu, autour et à partir des réflexions et travaux de terrain menés en animation, en design collaboratif, en accompagnement du changement...

Les travaux qui s'amorcent et se dérouleront pendant les prochains mois vont permettre une mise à jour conceptuelle, de l'analyse de données, des synthèses et bilans d'expérience à colliger... Tout ceci avec la collaboration de Caroline. Un événement de partage de connaissances est également prévu, en octobre prochain, et des publications suivront.

Peu à peu, à partir d'ici, vous pourrez suivre les activités en cours. Entre temps, vous pouvez aussi me retrouver ici :

Pour suivre les inspirations quotidiennes du 4e Œil sur Facebook

Le site web du 4e Œil et de son auteure

Il y a quelques temps, j'avais lu
en page de garde de Iotékha, de Robert Lalonde : "C'est ensemble que l'auteur et le lecteur doivent se frotter les yeux". C'est ce que je nous souhaite.
À bientôt.